Déclaration d’Édouard Beigbeder, directeur régional de l’UNICEF pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord.
Amman, le 26 octobre 2025 – « Il y a deux semaines, le début du nouveau cessez-le-feu dans la bande de Gaza a apporté aux familles un soulagement longtemps attendu, offrant une chance inespérée pour assurer la survie, la sécurité et la dignité des enfants.
Les conversations que j’ai pu avoir dans la bande de Gaza la semaine dernière ont toutes fait écho au même message : le cessez-le-feu doit tenir et doit apporter, au-delà du calme, des actions concrètes.
Les opérations militaires israéliennes dans la bande de Gaza ont causé des ravages considérables. Les mots et les chiffres ne suffisent pas à décrire l’ampleur des conséquences que j’ai pu constater sur les enfants, conséquences qui perdureront sur plusieurs générations. Les enfants ont enduré des souffrances inimaginables : plus de 64 000 enfants auraient été tués ou blessés et plus de 58 000 auraient perdu un parent pendant le conflit. Des villes entières ont été rasées et des infrastructures essentielles détruites. Un million d’enfants ont enduré les horreurs quotidiennes de la lutte pour la survie dans l’endroit le plus dangereux au monde pour un enfant, ce qui engendre chez eux de profonds traumatismes liés à la peur, à la perte et au deuil.
L’action de l’UNICEF
L’intensification de l’aide humanitaire de l’UNICEF suite au cessez-le-feu est en cours. Nous menons une course contre la montre pour sauver la vie des enfants menacés par des causes évitables, telles que la malnutrition, les maladies et le froid hivernal. Nous élargissons les traitements nutritionnels face à la famine, acheminons de l’eau potable par camion aux familles dans leurs lieux de refuge et leur fournissons des couvertures, des vêtements et des abris.
Mardi, j’ai rencontré Hoor, une petite fille de 8 mois souffrant de malnutrition aiguë sévère. Grâce aux traitements fournis par l’UNICEF, elle se rétablit, et l’aide financière versée à sa famille lui permet d’acheter de la nourriture sur les marchés locaux.
Nous avons également commencé à aider nos partenaires locaux à réparer et à reconstruire les services publics essentiels de Gaza. Ces infrastructures sont vitales et doivent être rétablies et maintenues. Cela implique de reconstruire et de rééquiper les établissements de santé avec le personnel, les locaux et les équipements nécessaires pour sauver des vies, de reprendre les vaccinations de routine, de réparer les réseaux d’approvisionnement en eau, de rétablir l’approvisionnement en énergie des infrastructures essentielles, de former les partenaires locaux à la prévention des maladies et de la malnutrition, d’étendre les programmes de travail rémunéré pour les jeunes, et bien plus encore.
L’éducation comme pilier de la reconstruction
On ne saurait trop insister sur l’importance de rétablir le système éducatif dans le cadre de ces premiers efforts de reconstruction. Après deux années d’interruption, les familles savent que le retour à une scolarité normale permettra de jeter les bases de l’apprentissage, de la guérison, de l’espoir et de la cohésion sociale à long terme dans leurs communautés.
L’UNICEF est parvenu à réintégrer plus de 100 000 enfants dans l’enseignement en présentiel pendant la guerre et vise désormais, en collaboration avec ses partenaires éducatifs, à permettre le retour de l’ensemble des 650 000 enfants d’âge scolaire à l’école.
L’UNICEF aménage des salles de classe semi-permanentes tout en réparant les écoles endommagées, en vue de reconstruire des écoles inclusives regroupant plusieurs services sous un même toît, allant de l’accès à l’eau potable à des services intégrés de santé mentale et de soutien psychosocial, en passant par des services de protection de l’enfance visant à favoriser le rétablissement émotionnel et la sécurité de chaque enfant.
L’appel de l’UNICEF
Le long chemin vers la reconstruction est en cours, grâce au soutien de la communauté internationale, mais certains engagements doivent être respectés de toute urgence afin d’accélérer et d’étendre ce travail essentiel.
Nous avons constaté une augmentation de l’aide de l’UNICEF autorisée à entrer dans la bande de Gaza depuis le cessez-le-feu, mais elle n’est pas encore suffisante.
Nous appelons à un acheminement sûr, rapide et sans entrave de l’aide humanitaire vers la bande de Gaza et demandons aux autorités israéliennes de faciliter cela en :
- ouvrant simultanément tous les points de passage vers la bande de Gaza, avec des procédures de contrôle améliorées et plus rapides ;
- Autorisant l’acheminement de l’aide par toutes les voies d’approvisionnement possibles, y compris via l’Égypte, Israël, la Jordanie et la Cisjordanie.
- Autorisant l’entrée urgente de divers types d’aide, en fonction des besoins évalués, y compris des fournitures précédemment refusées ou soumises à des restrictions. Les kits éducatifs et d’aide psychosociale et de santé mentale de l’UNICEF sont bloqués depuis plus d’un an. Nous avons besoin que ces kits puissent entrer immédiatement.
L’UNICEF appelle toutes les parties à respecter pleinement leurs obligations en vertu du droit international et de l’accord de cessez-le-feu. Les civils, en particulier les enfants, doivent être protégés à tout moment. Les personnes déplacées doivent être autorisées à se déplacer librement et à retourner volontairement chez elles en toute sécurité, dès que les conditions le permettront. Les acteurs humanitaires doivent bénéficier d’un accès sûr, durable et sans entrave aux familles, où qu’elles se trouvent. Les enfants qui ont besoin de soins spécialisés et urgents non disponibles dans la bande de Gaza doivent être évacués sans délai, avec leurs aidants.
Un espoir fragile renaît à Gaza alors que les travaux de reconstruction se mettent en place. Le monde entier ne peut pas permettre que ce cessez-le-feu échoue. Cela prendra du temps, mais un avenir inclusif qui donne la priorité aux droits des enfants de Gaza est possible grâce à la paix, à l’action et à la volonté collective. »
Soutenir nos actions d’urgence pour les enfants du Proche-Orient