Résumé des propos de Jérôme Pfaffmann Zambruni, chef de l’unité d’urgence de santé publique de l’UNICEF – à qui toute citation peut être attribuée – lors de la conférence de presse s’étant tenue aujourd’hui au Palais des Nations à Genève.
Genève, le 19 mai – « La situation actuelle du choléra dans le monde est sans précédent en raison de l’ampleur alarmante des flambées de la maladie, de leur extension géographique et du taux de mortalité exceptionnellement élevé. Nous devons accroître nos moyens de réponse. C’est un signal d’alarme.
- Vingt-cinq pays ont déjà déclaré des épidémies depuis le début de l’année 2023. Et nous ne sommes pas encore à la moitié de l’année. Selon une nouvelle analyse, 22 autres pays dans le monde risquent de déclarer des épidémies de choléra.
- Au cours des dix dernières années, le choléra a connu un déclin constant dans le monde. Mais cette tendance s’est inversée en 2021 avec une augmentation des cas qui se poursuit en 2023. Ce mois-ci, 24 pays signalent des épidémies de choléra, contre 15 l’année dernière à la même époque. Si la tendance se poursuit, d’autant plus que l’Afrique de l’Ouest entre maintenant dans la saison des pluies, nous pourrions dépasser le nombre total annuel de pays luttant contre les épidémies en 2022 et 2021.
- Le choléra une maladie dont personne ne devrait mourir. Des taux de mortalité supérieurs à 1 % révèlent généralement des problèmes de qualité, d’accès et de rapidité du traitement. Avec l’apparition d’épidémies dans un nombre croissant de pays, le nombre de personnes qui meurent du choléra est plus élevé que par le passé. Par exemple, 3 personnes sur 100 infectées par la maladie au Malawi (depuis le début de l’épidémie en mars 2022) et au Nigeria (en 2023) sont mortes.
Contrôler et prévenir
Plus nous restons longtemps sans le soutien nécessaire pour contrôler et prévenir le choléra, plus la maladie se propage et plus les besoins de financement augmentent. Il ne s’agit pas seulement d’argent, mais aussi et surtout de communautés qui ont besoin d’aide.
- En novembre 2022, l’UNICEF a lancé un appel aux donateurs pour obtenir 150 millions de dollars afin de répondre aux épidémies de choléra. Mais le soutien est resté faible.
- Depuis lors, en l’espace de six mois seulement, l’appel de fonds a augmenté de 220 % alors que la situation devenait de plus en plus grave. L’inaction coûte des vies et de l’argent.
- La recrudescence du choléra, d’une ampleur et d’une gravité sans précédent, est un signal d’alarme urgent qui nous incite à agir ensemble et maintenant : protéger les personnes touchées par les épidémies actuelles et investir dans les services de santé et d’eau, d’assainissement et d’hygiène de base (WASH).
- La situation va s’aggraver. Nous savons que la question n’est pas de savoir si cela arrivera, mais quand. Nous constatons que le changement climatique agit comme un multiplicateur de vulnérabilité. Avec l’augmentation du nombre et de l’intensité des chocs climatiques et le réchauffement des températures, les services WASH seront de plus en plus endommagés, les sources d’eau potable contaminées et les déplacements de populations de plus en plus nombreux. J’en veux pour exemples les cyclones comme Freddy au Mozambique et au Malawi, les inondations au Pakistan et au Nigeria l’année dernière ou la sécheresse dans la Corne de l’Afrique, qui ont créé des conditions propices aux maladies d’origine hydrique. Après le passage du cyclone Mocha au Myanmar et au Bangladesh, l’UNICEF craint que le risque de maladies hydriques ne s’accroisse dans les jours à venir.
- Le changement climatique rend également les « saisons du choléra » moins prévisibles. Bien que de grandes parties du monde soient actuellement en situation de « faible transmission du choléra », il est inquiétant de constater que de nombreuses régions sont encore témoins d’épidémies au cours d’une période traditionnellement marquée par une transmission minimale ou inexistante. Nous assisterons à des flambées encore plus étendues lorsque le monde entrera dans la « haute saisonnalité du choléra ».
- Pour les douze prochains mois, l’UNICEF a besoin d’urgence de 480 millions de dollars pour des interventions immédiates de prévention et de lutte contre le choléra dans les domaines de la santé, de l’eau, de l’assainissement et de la protection de l’environnement, ainsi que pour des campagnes de sensibilisation visant à modifier les comportements et habitudes sociales en matière de WASH.
Une pandémie des pauvres
Le choléra est depuis longtemps une « pandémie des pauvres ». Il est inacceptable que si peu d’attention et de soutien aient été accordés aux personnes vulnérables touchées par cette maladie.
- Le choléra est un marqueur de pauvreté et d’exclusion. Il touche de manière disproportionnée les communautés pauvres et vulnérables qui n’ont pas accès aux services de base et dont les systèmes de santé sont les plus faibles.
- Le choléra est de plus en plus présent dans les contextes fragiles et d’urgence. Depuis 2019, des épidémies de choléra se sont déclarées dans plus de la moitié des pays en situation d’urgence humanitaire
- Le sous-investissement dans les systèmes WASH est un indicateur de risque précis pour le choléra : 97 % des cas de choléra entre 2010 et 2021 se sont produits dans les pays où les niveaux de services d’eau et d’assainissement sont les plus faibles au monde.
Sans accès à des services d’eau et d’assainissement sûrs, il est pratiquement impossible de prévenir et de contrôler la transmission du choléra et d’autres maladies d’origine hydrique. »
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